« Rêves australs », peintures aborigènes

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« Rêves australs », peintures aborigènes

 

Après de longs mois de confinement et de restrictions, la Villa Théo est heureuse d’accueillir à nouveaux ses visiteurs cet été. Pour lancer la saison culturelle du Lavandou, le centre d’art de Saint-Clair fait souffler entre ses murs un vent coloré de liberté et de motifs millénaires en présentant des œuvres du bout du monde, venues des terres australes où l’art constitue un élément clé de la culture des anciennes tribus nomades qui y vivent et entretiennent cette créativité.

Les Aborigènes d’Australie qualifient leurs peintures de « Rêves ». Ceux-ci relatent la création de l’univers par leurs ancêtres, les génies fondateurs dont ils perpétuent le mythe par le chant, la danse et le dessin, à défaut de langue écrite. Ils ont ainsi appliqué des pigments naturels sur les parois rocheuses, sur des écorces d’eucalyptus ou sur leur propre corps durant des millénaires.

Depuis une cinquantaine d’années, les Aborigènes réalisent des peintures acryliques sur toile, « objets culturels hybrides issus d’une tradition graphique et religieuse. » Cette forme d’expression utilisant des matériaux modernes a permis à ce peuple meurtri d’afficher sa culture à la face du Monde. Cette peinture revêt un sens politique car elle affirme une antériorité sur le sol australien et clame une identité. Ces « Rêves » sont aussi des cris.

En 1971, Geoffrey Bardon, un jeune professeur de dessin nommé dans la communauté de Papunya (centre de regroupement des Aborigènes au cœur du désert australien), réunit quelques anciens afin de leur faire réaliser une peinture sur les murs de son école et de transmettre ainsi leurs « motifs » aux jeunes générations. Cet épisode fit naître de nouvelles vocations et certains Aborigènes commencèrent à raconter des histoires mythiques décrivant « Le Temps du Rêve » (DreamTime), monde parallèle spirituel où se mêlent l’évocation d’êtres ancestraux, de leurs actions et de leurs terres sacrées. Cette forme d’expression picturale, qui jouit désormais d’une grande popularité, est considérée à la fois comme représentative des Arts premiers et, selon le Time Magazine, constitue « le dernier grand mouvement artistique du XXe siècle ; un art vivant, pratiqué de nos jours, et pourtant toujours relié à l’expression artistique la plus primitive. » Avec plus de 60 000 ans d’histoire, cette culture se révèle être l’une des plus anciennes au monde. Et même si l’on n’en connaît pas toutes les significations secrètes, ces œuvres suscitent toujours une émotion par leur force esthétique.

Le commerce et le regard occidental porté sur ces représentations, purement rituelles à l’origine, leur ont conféré le statut d’œuvres d’art et leurs créations ont fait vivre les communautés pendant plusieurs décennies grâce aux coopératives d’art où se regroupent les peintres aborigènes. Malheureusement, cet équilibre est désormais mis à mal en raison de la spéculation farouche des marchands d’art et des galeries. Mais de jeunes artistes d’origine aborigène, après avoir eu la possibilité de suivre des études et de voyager, osent réinterpréter les rêves des anciens et font aujourd’hui des propositions plastiques résolument contemporaines qui ne manquent pas de susciter l’intérêt des musées et des collectionneurs du monde entier.

Issue d’une collection privée, cette exposition permet d’assister à l’abandon progressif de la symbolique ancestrale pour l’abstraction et à l’explosion des couleurs chez des artistes désormais reconnus.

 

Villa Théo, 265 av. Van Rysselberghe. Ouvert du mardi au samedi, 10 h – 12 h / 14 h – 17 heures.
Entrée libre. Renseignements au 04 94 00 40 50 / 04 22 18 01 71 – www.villa-theo.fr